Découverte majeure : un variant génétique influence l’efficacité de la dialyse péritonéale
EN BREF :
- Une équipe de l’UCLouvain et des Cliniques universitaires Saint-Luc a identifié un variant génétique fréquent associé à l’efficacité de la dialyse péritonéale, la modalité de dialyse à domicile la plus utilisée dans le monde
- Les chercheurs présentent une stratégie permettant de réduire l’impact négatif de ce variant et d’améliorer le devenir des patients traités par la dialyse péritonéale
- Les résultats de cette étude internationale (Europe-Asie) sont publiés dans le prestigieux New England Journal of Medicine
- L’UCLouvain et les Cliniques Saint-Luc sont leaders dans la recherche sur la dialyse péritonéale
Un consortium international dirigé par le Pr Olivier Devuyst (Institut de recherche expérimentale et clinique, UCLouvain), en collaboration étroite avec le Service de néphrologie des Cliniques universitaires Saint-Luc (Prs Johann Morelle et Éric Goffin), a identifié une variation dans le gène AQP1 liée à l’efficacité de la dialyse péritonéale (pratiquée à domicile) et à la survie des patient·es traités par cette technique. C’est la première fois qu’un facteur génétique fréquent est associé à l’efficacité de la dialyse. Cette étude vient d’être publiée dans la prestigieuse revue New England Journal of Medicine.
Le gène AQP1 encode la protéine aquaporine-1 qui facilite le passage d’eau à travers la membrane des cellules. Cette protéine est indispensable au bon fonctionnement de la dialyse péritonéale, une dialyse à domicile qui utilise une membrane naturelle, le péritoine, pour éliminer les toxines et l’excès d’eau des patients en insuffisance rénale. Efficace, simple, et peu coûteuse, la dialyse péritonéale est utilisée dans de nombreux pays, y compris dans les pays émergents.
L’étude clinique, réalisée chez près de 2 000 patients en dialyse péritonéale dans plusieurs pays d’Europe et en Chine, a montré que les patient·es possédant deux copies de ce variant du gène AQP1 (15% de la population), ont une diminution sensible de la capacité à éliminer de l’eau en dialyse et un risque accru de décès.
Grâce à des techniques de pointe incluant génétique, modèles expérimentaux et études cellulaires, les scientifiques ont découvert que les patient·es porteur·euses du variant génétique ont moins d’aquaporines dans le péritoine, diminuant la capacité de transport d’eau à travers la membrane. Ils ont également démontré que l’utilisation d’un agent osmotique particulier (une solution contenant des polymères attirant l'eau) lors de la dialyse permet de limiter l’impact du facteur génétique. Ces effets bénéfiques ont été observés dans des modèles expérimentaux et chez les patients.
Les aquaporines sont au cœur des travaux du laboratoire d’Olivier Devuyst, suite à sa rencontre avec Peter Agre, Prix Nobel de chimie 2003 pour la découverte des aquaporines (Johns Hopkins Medical School, Baltimore, USA). Aujourd’hui, le laboratoire du Pr Devuyst et le Service de néphrologie des Cliniques universitaires Saint-Luc détiennent un leadership en matière de dialyse péritonéale, ce qui leur permet de faire partie de réseaux internationaux financés par l’Union européenne, le National Institutes of Health (USA) et, au sein de l’UCLouvain, le consortium Louvain4Water.
Au-delà des progrès dans la connaissance du processus fondamental de transport d’eau chez l’homme, cette découverte ouvre la voie à de nouveaux essais cliniques prospectifs à large échelle chez les patients traités par la dialyse péritonéale. Elle permettra le développement de nouveaux traitements (par exemple, solutions de dialyse) visant à améliorer le passage d’eau à travers les aquaporines. « C’est un pas en avant vers une médecine de précision pour les patients en insuffisance rénale », se réjouissent les Prs Morelle et Goffin, « car certains facteurs génétiques peuvent guider la prescription et améliorer l’efficacité de la dialyse. »